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«Oui, mais...», disent les pharmaciens à la pharmacogénomique

Dans quelques années, il sera sans doute possible de prescrire des médicaments en fonction des gènes de chaque personne. En attendant, ce qu'on appelle la pharmacogénomique en est encore au stade de la recherche, à l'exception de quelques traitements pour soigner le cancer et le VIH. Mais qui dit génétique, dit souvent soucis et questionnements.

 

C'est pourquoi des chercheurs préparent déjà le terrain à l'avènement de cette nouvelle pratique.

Le Groupe d'action pour la pharmacothérapie personnalisée (GAPP) de l'UdeM a récemment sondé 284 pharmaciens du Québec pour connaitre leur opinion sur la pharmacogénomique. Plus de 95% d'entre eux ont affirmé qu'ils n'hésiteraient pas à recommander des tests pharmacogénomiques à leurs patients si cela pouvait aider à prédire l'efficacité d'un médicament. Toutefois, moins de 7% des pharmaciens se sentent aptes à utiliser les résultats de ces tests pour conseiller des patients.

«Les pharmaciens aimeraient intégrer la pharmacogénomique à leur pratique, mais ils ne sont pas encore prêts à le faire. Ils le feront lorsque les données scientifiques seront convaincantes et qu'ils seront mieux formés», résume Simon de Denus, professeur agrégé à la Faculté de pharmacie de l'Université de Montréal, membre du GAPP et auteur principal de l'étude. Il est aussi titulaire de la Chaire en pharmacogénomique Beaulieu-Saucier de l'UdeM, située à l'Institut de Cardiologie de Montréal.

Selon les résultats du sondage, les pharmaciens ne demandent que cela: 96,6% souhaitent suivre des activités de formation continue en pharmacogénomique. Signe des temps, près de 70 % préfèreraient s'inscrire à des cours en ligne. Leur vœu sera exaucé. Simon de Denus et son équipe mettent actuellement au point un cours de un crédit qui sera offert sur Internet vers la fin de 2014.

Besoin d'éducation

Les pharmaciens cultivent de grands espoirs quant aux promesses offertes par la pharmacogénomique. Environ 80% se disaient modérément optimistes à l'idée que la pharmacogénomique puisse prévenir un patient que tel médicament ou telle posologie seraient mauvais pour lui.

Mais ils entretiennent également plusieurs inquiétudes. Plus de 87 % des pharmaciens interrogés s'inquiètent du fait que les compagnies d'assurances pourraient obtenir des renseignements sur les prédispositions génétiques de leurs clients lorsque ceux-ci se feraient prescrire certains médicaments. Près de 65 % craignent qu'un test exigé pour une maladie révèle des risques pour une autre. D'autres sujets sont source d'appréhension: la confidentialité des données; l'incidence psychologique des résultats des tests sur les patients et leur famille; la possibilité que les tests établissent qu'aucun médicament n'est approprié au patient.

Fait intéressant, environ 57 % des répondants ont affirmé que, dans le cas d'une maladie potentiellement mortelle, ils recommanderaient à leur patient de prendre un médicament même si celui-ci se révèle inefficace selon des tests pharmacogénomiques. «Bien sûr, c'est un cas extrême», signale Simon de Denus. La réponse à cette mise en situation, couplée aux inquiétudes des pharmaciens, confirme le besoin pressant d'éduquer les professionnels de la santé au sujet de la pharmacogénomique.

«Les gens ont l'impression que tout est différent quand on parle de génétique, observe-t-il. Pourtant, les cliniciens sont parfois obligés d'annoncer à leurs patients qu'ils ne peuvent recevoir des traitements en raison de leur âge ou d'une contrindication par exemple. Il serait par ailleurs surprenant qu'aucun médicament ne convienne à un patient, car nous avons presque toujours d'autres possibilités. La pharmacogénomique nous permettra dans l'avenir de choisir le meilleur médicament à la meilleure dose.»

Il ajoute que les résultats de tests pharmacogénomiques demeureront confidentiels, comme le sont toutes les données liées à la santé des individus, et ce, dans le but de réduire les risques potentiels de discrimination.

«Cette étude montre que, en tant que professionnels de la santé, nous devrons nous préparer à répondre à ces questions, croit Simon de Denus. Nous devrons aussi gérer les attentes des patients. La génétique n'est pas magique, car les gènes ne sont qu'une fraction de qui nous sommes. L'environnement compte pour beaucoup dans la réponse aux médicaments et dans les prédispositions aux maladies.»

Cette recherche a été publiée dans le dernier numéro de Pharmacogenomics et compte également parmi ses auteurs Nathalie Letarte, Thierry Hurlimann, Jean-Philippe Lambert, Annie Lavoie, Laura Robb, Nancy L. Sheehan, Jacques Turgeon et Barbara Vadnais.

Marie Lambert-Chan

 

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